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Les tests de grossesse gratuits en lien avec l’adoption de la contraception hormonale

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D’après une évaluation d’intervention menée en 2013 dans les milieux ruraux de Madagascar, la dotation des agents de santé communautaire (ASC) en tests de grossesse semble un moyen efficace d’accroître leur distribution de contraceptifs hormonaux.1 Par rapport aux ASC du groupe témoin de l’étude, ceux du groupe d’intervention — dotés de tests de grossesse urinaires à distribuer gratuitement aux femmes de leur communauté et formés à leur utilisation — ont fourni des contraceptifs hormonaux (le contraceptif injectable ou la pilule) à un plus grand nombre moyen de nouvelles clientes par mois pendant les quatre mois de la période d’étude  (3,1 par rapport à 2,5). Dans les analyses par méthode spécifique, la différence par groupe est observée pour la distribution du contraceptif injectable mais pas de la pilule.

À Madagascar, les ASC sont autorisés à vendre des contraceptifs aux résidentes des milieux ruraux, où l’accès à d’autres prestataires de la planification familiale est limité. Avant la fourniture d’une méthode hormonale, les ASC sont censés confirmer que la cliente n’est pas enceinte. Cela se fait généralement au moyen d’une liste de six questions, qui produisent cependant souvent de hauts taux de faux positifs, de sorte que de nombreuses femmes sinon admises se voient refuser une méthode hormonale. Afin d’évaluer si la dotation des ASC en tests de grossesse urinaires gratuits améliore la distribution de la contraception hormonale, les chercheurs ont évalué une intervention mise en œuvre dans trois régions de l’est de Madagascar en 2013.

Tous les ASC en service dans les régions de l’étude étaient admis à participer. Les chercheurs en ont cependant exclu 48 dans deux districts difficiles d’accès, ainsi que 36 sous charge de clientèle extrêmement lourde, produisant ainsi un échantillon final de 622. Au sein de chaque région, la moitié des ASC participants a été affectée aléatoirement au groupe d’intervention et l’autre moitié, au groupe témoin. Les ASC du groupe d’intervention ont chacun reçu un approvisionnement gratuit de 50 tests de grossesse et ont été formés à leur utilisation, sans toutefois être spécifiquement instruits d’y recourir pour la fourniture de contraceptifs hormonaux. Tous les ASC ont été formés à la collecte de données relatives aux services de planification familiale au moyen d’un formulaire de rapport mensuel. Les données ont été collectées auprès des ASC à la base et pour chacun des quatre mois suivant la formation; elles ont été analysées par analyses descriptives et de régression par la méthode des moindres carrés ordinaires.

À la base, la majorité des ASC des groupes d’intervention et témoin étaient des femmes (65% et 72%, respectivement) mariées (86% et 83%); dans les deux groupes, l’âge moyen était de 43 ans. En moyenne, les ASC vivaient à deux heures de marche du centre de santé le plus proche et devaient parcourir près de 20 kilomètres pour renouveler leur approvisionnement en produits de santé à revendre. Bien que la grande majorité (94%) ait déclaré utiliser la liste de contrôle pour déterminer l’état de grossesse, moins de la moitié (46%) l’estimait « très fiable ». Les ASC du groupe d’intervention servaient une moyenne de 39 clientes de la contraception par mois (24 clientes du contraceptif injectable et 15 de la pilule), sans différence significative par rapport aux nombres moyens du groupe témoin (total de 41 clientes, 27 du contraceptif injectable et 14 de la pilule). Les seules différences observées à la base sont que les ASC du groupe d’intervention travaillaient moins d’heures par semaine (17 par rapport à 20) et que ceux du groupe témoin étaient plus susceptibles de déclarer avoir connu une pénurie de contraceptif injectable (35% par rapport à 22%).

Sur la période d’étude de quatre mois, les ASC du groupe d’intervention ont servi en moyenne 3,1 nouvelles clientes de la contraception hormonale par mois, alors que les ASC témoins en servaient une moyenne mensuelle de 2,5. La différence est statistiquement significative et représente un impact d’intervention de 26%. Les analyses par méthode contraceptive constatent que les ASC d’intervention ont servi plus de nouvelles clientes du contraceptif injectable par mois que les ASC témoins (1,9 par rapport à 1,5, respectivement), sans révéler toutefois de différence entre les deux groupes au niveau du nombre mensuel moyen de nouvelles clientes de la pilule servies. De plus, aucune différence suivant le groupe n’apparaît dans le nombre de sessions de planification familiale individuelles tenues par mois ou dans la fréquence d’utilisation de la liste de contrôle de grossesse.

Les auteurs concluent que « la dotation des ASC en tests de grossesse gratuits offre un moyen efficace d’augmenter la distribution de contraceptifs hormonaux dans les pays tels que Madagascar, en particulier lorsque les agents de santé ne sont pas formés ou hésitent à utiliser la liste de contrôle de grossesse ». Ils suggèrent que « dans la mesure où les tests de grossesse — qui représentent un coût unitaire inférieur à 0,10 $ US — offrent une solution de plus en plus abordable aux systèmes de santé des pays en développement, les programmes de distribution communautaire devraient envisager leur utilisation comme addition peu coûteuse aux services des ASC ». Par suite des observations de cette étude, le ministère de la Santé, avec l’aide d’USAID, soutient désormais la distribution de tests de grossesse sur l’ensemble du pays.—J. Rosenberg
 

Référence

1. Comfort AB et al., Providing free pregnancy test kits to community health workers increases distribution of contraceptives: results from an impact evaluation in Madagascar, Contraception, 2016, 93(1):44–51.