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Hausse des taux d’accouchement assisté par du personnel qualifié au Burkina Faso après l’initiation de la politique de subvention des frais d’utilisation

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Après l’initiation en 2007 d’une politique de subvention des frais d’utilisation des services de santé maternelle au Burkina Faso, le taux d’accouchement assisté par du personnel qualifié a augmenté parmi les femmes de toutes les couches socioéconomiques. Les résultats d’une étude quasi-expérimentale menée en 2008–2010 révèlent une hausse soutenue pendant deux ans et particulièrement prononcée parmi les femmes les plus pauvres.1 Ainsi, parmi les femmes de la couche socioéconomique inférieure, le taux d’accouchement assisté par du personnel qualifié affiche une hausse estimée à 45% immédiatement après la mise en œuvre du programme, par rapport à ce qu’il aurait été en l’absence de la politique de subvention (rapport de taux, 1,5). Six à 24 mois après la mise en œuvre, les taux sont estimés de 46% à 48% supérieurs à ce qu’ils auraient été en l’absence de la subvention (1,5 chacun). Parmi les femmes de la couche socioéconomique supérieure, les taux sont estimés de 19% à 21% supérieurs zéro à 24 mois après la mise en œuvre du programme (1,2 chacun).

En 2007, dans un effort de promotion de l’accouchement institutionnalisé assisté par du personnel qualifié, le gouvernement burkinabè a initié la subvention de 80 à 100% des coûts directs de l’accouchement en établissement de santé. La documentation relative aux effets de telles subventions étant toutefois limitée et contradictoire, les chercheurs ont examiné les effets de la subvention des frais d’utilisation sur l’accouchement assisté par du personnel qualifié au niveau de toutes les couches socioéconomiques. Ils ont utilisé aux fins de leur étude les données de deux enquêtes en population effectuées dans les districts sanitaires de Houndé et de Ziniaré en 2008 et 2010, ainsi que d’une enquête menée en 2010 auprès des 27 centres de santé primaire de la zone soumise à l’étude. Les femmes admises aux enquêtes en population devaient être âgées de 15 à 49 ans et avoir accouché durant les cinq années précédentes pour l’enquête de 2008 ou les deux années précédentes pour celle de 2010. La période d’observation va de 50 mois avant l’initiation de la subvention à 41 mois après. Au total, 1 408 femmes avaient participé à l’enquête de 2008 et 1 403 à celle de 2010; sur l’ensemble des femmes, 74% avaient participé aux deux.

Les enquêtes en population ont collecté des données relatives aux caractéristiques sociales, démographiques et économiques des femmes et de leur ménage, à leur comportement de recherche de soins pendant la grossesse et à l’accouchement, ainsi qu’au moment et aux conditions de l’accouchement. L’enquête auprès des établissements a évalué la qualité des soins assurés dans les centres de santé primaire de la zone d’étude par l’examen du nombre et de la composition du personnel, des équipements médicaux et de l’infrastructure, y compris l’accès à l’eau. Les chercheurs ont calculé les statistiques descriptives des femmes et procédé par analyses de régression Poisson modifiée afin de déterminer les rapports et les différences de taux concernant les associations entre l’initiation des subventions et l’accouchement assisté par du personnel qualifié dans le temps, sur l’ensemble du spectre socioéconomique. Ils ont par ailleurs estimé les taux attendus pour 2007 et au-delà sous scénario hypothétique d’absence subventionnelle aux fins de l’interprétation causale des changements de taux estimés.

Globalement, 59% des accouchements concernaient des femmes âgées de 20 à 29 ans et 75%, des femmes non instruites. Il s’agissait, pour environ 74% des naissances, de femmes vivant dans un rayon de cinq kilomètres d’un centre de santé. Parmi les centres de santé, 81% disposaient d’un personnel composé de trois ou quatre professionnels et 59% avaient accès à une source d’eau fonctionnelle. Les statistiques descriptives sont généralement similaires avant et après la mise en œuvre des subventions, à quelques exceptions près: après l’initiation du programme de subvention, une plus grande proportion des accouchements concerne les femmes originaires de milieux ruraux (61% par rapport à 49%) et de plus grandes proportions de centres de santé comptent un personnel de quatre professionnels et ont accès à une source d’eau fonctionnelle (25% par rapport à 15% et 66% par rapport à 52%, respectivement).

L’analyse multivariée révèle que, par rapport au taux estimé d’accouchements assistés par du personnel qualifié en l’absence de la subvention, le taux relevé immédiatement après la mise en œuvre est de 45% supérieur parmi les femmes de la couche socioéconomique inférieure (rapport de taux, 1,5). Il est ensuite de 46% à 48% entre six et 24 mois après la mise en œuvre (1,5 chacun). La différence de taux reste constante, à 14%, à chaque point dans le temps. Les résultats relatifs aux femmes des couches socioéconomiques intermédiaire et supérieure sont similaires à ceux de la couche inférieure, bien qu’à moindre envergure: pour les femmes de la couche intermédiaire, le taux est de 28% à 30% supérieur (1,3) et la différence de taux est de 7% à chaque point temporel; pour celles de la couche supérieure, le taux est de 19% à 21% supérieur (1,2) et la différence de taux est de 1% à chaque point dans le temps.

Parmi les limites de l’étude, les chercheurs font mention de caractéristiques d’accouchement peut-être sujettes au biais de rappel et de la possibilité d’erreurs de classification des composantes de structure de la qualité des soins (qui, à leur tour, peuvent présenter certaines limites de validité de contenu car elles n’estiment pas la qualité perçue des soins). Et de noter en outre que la validité de leurs résultats et l’interprétation causale des changements estimés des taux d’accouchement assisté par du personnel qualifié « reposent sur la supposition que l’extrapolation de la tendance préexistante du taux [d’accouchement assisté par du personnel qualifié] dans le segment temporel post-intervention était justifiée ». Malgré ces limites, les chercheurs laissent entendre que leurs « observations confirment l’utilité de la subvention des services de santé maternelle », concluant que « l’effet de la politique de subvention sur la hausse [des accouchements assistés par du personnel qualifié] suscite un potentiel de réduction significative de la morbidité et de la mortalité maternelles ».—L. Melhado
 

Référence

1. Langlois EV et al., Effect of a policy to reduce user fees on the rate of skilled birth attendance across socioeconomic strata in Burkina Faso, Health Policy and Planning, 2016, doi: 10.1093/heapol/czv088.